« Difficile d'écrire son histoire lorsqu'on habite dans une porcherie et, qui plus est, lorsqu'on est devenue une truie. Car telle est l'extraordinaire aventure de la narratrice de cette fable terriblement sensuelle, qui se métamorphose sous les yeux stupides de son ami Honoré, prend du poids, se découvre une soudaine aversion pour la charcuterie, se voit pousser des seins surnuméraires, et finit, bien obligée, par quitter la parfumerie dont elle était l'hôtesse très spéciale... Tantôt humaine, tantôt animale, elle erre dans les égouts et dans les jardins publics où elle se nourrit de débris végétaux, elle met bas ses porcelets, devient l'égérie du futur président de la République avant d'être la maîtresse d'un très séduisant loup qui se nourrit de livreurs de pizzas et manquer finir sa vie dans l'assiette de sa propre mère. Derrière ces aventures porcines se profile une société aux prises avec un extrémisme obsessionnel de la vie saine mais de fait corrompue, une vaste ferme des animaux où les achats se règlent en Euro ou en Internet Card, où charlatans et fous mystiques se disputent le pouvoir. Le récit de cette modification se double donc d'un conte moral où l'oeuvre d'imagination affiche ses intentions de satire sociale. Se plaçant d'emblée sous l'égide de Knut Hamsun, de la glèbe et de la sauvagerie attenante à l'humain, la narratrice, truie endiablée, permet au lecteur de renouer avec des plaisirs de lecture qui viennent de très loin. »

« L'oeuvre de Marie Darrieussecq fait penser à Lautréamont : le rêve du pourceau, au chant IV, commençait par ces mots : "je rêvais que j'étais entré dans le corps d'un pourceau... quand je voulais tuer, je tuais. "Truismes" en découlait. Le passage de Falmer, ou le spectre de Maldoror voltigeant au-dessus du Panthéon, c'est "Naissance des fantômes". "White", c'est l'hymne à l'océan, l'homme amphibie, ou même la "fille de neige" qui fait une apparition au chant VI. »

« Contrairement au Gregor Samsa de Franz Kafka qui se réveille dès l'incipit métamorphosé en scarabée, l'héroïne et narratrice de Truismes rapporte chaque étape de sa transformation, de ses prises de poids inexpliquées à la naissance d'excroissances à l'utérus ou sur le ventre. L'inspection de chaque nouveau stigmate corporel traduit un va-et-vient permanent entre la réalité physique de la transformation et son sens symbolique et métaphorique. Le corps-truie se révèle ainsi au fur et à mesure de l'avancée du récit être une représentation dégradée du corps sexualisé de la femme. Truismes peut être lu comme un récit allégorique de puberté, comme la saisie poétique des représentations du corps féminin et du corps sexué qui structurent notre société, et ce grâce à l'écriture de l'allégorie et de l'anti-utopie. »

Relations humaines réduites au commerce, harcèlement sexuel généralisé, charters de sans papiers renvoyés chez eux, planète en surchauffe, délires religieux, populismes et contre-vérités, spécisme rendu obsolète par la porosité entre les corps mutants... Truismes, écrit en 1996, relevait d'une sorte de littérature imminente. 

« Not easy writing your story when you live in a pigsty, and, what's more, when you've become a sow. Such is the extraordinary adventure of the female narrator of this bitingly sensual fable, who undergoes this transformation under the stupid gaze of her boyfriend Honoré, who puts on pounds, who realizes a sudden aversion to pork products, who finds herself growing supernumerary breasts, and who finishes, without choice, by leaving her job at the perfume store where she is a very special kind of hostess… Sometimes human, sometimes animal she ends up rummaging in the gutters and the public gardens where she finds vegetable garbage to eat; she gives birth to piglets; she becomes the spokesperson for the future president of France before becoming the mistress of a very seductive wolf who eats pizza delivery men, and she almost ends her life on the plate of her own mother.

Behind these porcine adventures a society is portrayed that appears obsessed with healthy living but which is actually corrupt, that is a vast animal farm where purchases are paid for with the Euro or the Internet Card, where charlatans and mystical nuts vie for power. The story of this transformation thus doubles as a morality play wherein one sees the intentions of social satire in the work of the imagination. Placing herself from the start under the aegis of Knut Hamsun, the narrator, devilish sow that she is, from the savagery attendant to humanity, allows the reader to reconnect with the pleasures of reading which come from afar. »

"When Marie Darrieussecq’s first novel Truismes exploded on to the French literary scene it was clear that she was a young writer intent on taking the reader to disturbing places. Set in a partially recognisable, dystopic France of the near future, this erotic, funny and inventive novel satirises right-wing extremism, repressive state mechanisms, new-age fanaticisms and political correctness gone mad. Its primary focus on gender and body politics is provocatively inflected by Darrieussecq’s choice of narrator – a young woman who metamorphoses into a sow – and the novel reveals the author’s penchant for probing the frontiers between the everyday and the and the fantastic, the mimetic and the marvellous..."